INTERVIEW : Plongée Dans le Domaine Des Hauts de Loire Avec Éric Hertz – Maître de Maison – Pour Un Séjour Empreint D’Émotion Et de Partage

INTERVIEW : Plongée Dans le Domaine Des Hauts de Loire Avec Éric Hertz – Maître de Maison – Pour Un Séjour Empreint D’Émotion Et de Partage

Couronné il y a quelques années du titre de Meilleur Hôtel de France par Condé Nast, Les Hauts de Loire se valent d’être un lieu d’exception, plein d’élégance où l’on vient goûter – le temps d’un séjour – la vie de château à la française.

Avec un décor féérique, une cuisine de haut vol mise en scène par le Chef Dominique Pépin, des activités multiples dans le domaine et à proximité, sans oublier un service d’excellence, le domaine Les Hauts de Loire propose une expérience aussi inoubliable qu’exceptionnelle.

Éric Hertz, Maitre de Maison des Hauts de Loire depuis 2012 – avec son énergie débordante et son désir de rendre ses hôtes heureux, est la personne idéale pour tenir une si belle maison. S’attelant à offrir une qualité de service irréprochable, Éric Hertz s’est confié à Icon-Icon pour une immersion dans ce lieu luxueux.

Rencontre avec Éric Hertz

Pour commencer et recontextualiser pour nos lecteurs, pourriez-vous revenir sur votre parcours ?  

Tout d’abord, les études n’étaient pas réellement faites pour moi, j’ai donc décidé de quitter les bancs de l’école assez tôt pour commencer à travailler. J’ai rapidement trouvé un poste de bagagiste dans un hôtel proche des Champs-Élysées – à cette époque, je gagnais plutôt bien ma vie, j’étais heureux, je rêvais de voyage et de croisière – puis j’ai rencontré mon épouse, et mes ambitions ont changé.

J’ai été remplaçant de concierge puis réceptionniste, où j’ai rapidement évolué pour devenir chef de réception – toujours dans le même hôtel. 

Pendant un an, j’ai travaillé à l’armée – ma première expérience en restauration – puis j’ai enchainé à l’hôtel Baltimore à Paris en tant que chef de réception – durant huit ans – j’ai ensuite souhaité changer de direction en étant ouvert aux propositions. On m’a alors proposé la gestion de trois hôtels Parisiens – Le Libertel Bellechasse, Le Libertel Sèvres Vaneau, et le Libertel Montparnasse, – trois petits hôtels certes, mais qui ont nécessité beaucoup de travail. Cette première expérience en tant que directeur a été très formatrice. 

En 2001 est survenu le 11 septembre. Un climat de panique s’en est suivi à la direction chez Accor, ils ont commencé à licencier et m’ont proposé le poste de Directeur Adjoint au Terminus Nord, un hôtel de 236 chambres.

Le Terminus Nord a été une expérience de plus – j’y ai passé deux ans – et même si ce poste était intéressant, il ne s’agissait pas du type d‘hôtellerie qui m’intéressait : un établissement trop grand, trop impersonnel, mais je pense que chaque expérience est bonne à prendre. Au bout de deux ans, je me suis intéressé aux châteaux et des relations de longue date m’ont fait une proposition pour prendre la direction du château de Mirambeau, en Charente Maritime.

Pour la première fois, cette expérience était devenue comme une évidence et j’ai compris que je ne ferai plus jamais autre chose.

Je suis arrivé dans ce métier par hasard, mais ce que je fais aujourd’hui c’est ce que j’ai toujours fait, même avant de commencer à travailler – c’est à dire, inviter une vingtaine d’amis, aller au marché, cuisiner de bons repas dans une ambiance festive, le plaisir de faire plaisir, le plaisir de trouver des choses qui allaient toucher les autres et de créer des moments de joie et de communion.

Qu’est-ce que cette première expérience en Relais & Châteaux vous a apporté pour l’intérêt à la pratique ?  

Au départ, on m’a demandé qu’est-ce qu’était pour moi un Relais & Châteaux, quels étaient mes avis sur le métier. Eh bien, pour moi, un Relais & Châteaux, c’est un hôtel – je ne vais pas dire que c’est un hôtel comme les autres – mais à partir du moment où l’on fait son métier de la même façon, c’est à dire avec « le plaisir de faire plaisir » ou le plaisir d’accueillir, que ce soit pour 2 étoiles ou pour 4 étoiles, vous faites tout simplement plaisir. 

Je cite souvent Charles Aznavour, lorsqu’on lui demande « Vous aimez le Rap !? » et qu’il répond « oui, j’aime bien le rap parce qu’il n’y a pas 36 sortes de musiques, il n’y a pas le rock, le reggae, etc. Il n’y a que 2 sortes de musiques, la bonne et la mauvaise. » – je pense qu’il en va exactement de même dans l’hôtellerie. Il m’est arrivé d’être très bien reçu dans des hôtels 2 étoiles et très mal reçu dans des hôtels 5 étoiles, donc je ne pense pas que ce soit une question d’étoile mais plutôt d’une impulsion de générosité et de gentillesse que l’on peut retrouver dans un 2 étoiles comme dans un 5 étoiles.

Ainsi, lorsque je suis arrivé dans cet établissement, la gestion en elle-même était identique à celle d’un hôtel, il y avait un personnel motivé, des clients à recevoir, de la gestion et de la comptabilité – il fallait tout simplement rajouter l’écrin pour donner de l’excellence à ce sentiment de gentillesse et de générosité.

Que pouvez-vous nous dire concernant le changement de chef ?

J’ai travaillé avec Rémy Giraud, de qui j’ai beaucoup appris puisqu’il s’agit d’un passionné – il n’y a pas une parcelle de son corps qui ne pense pas et ne vit pas cuisine. Il est passionné par tout ce qui touche de près ou de loin à la gastronomie et à la cuisine. Travailler avec quelqu’un comme cela est quelque chose de très excitant et stimulant. 

Lorsque le chef m’appelait pour me faire gouter quelque chose, j’étais toujours impressionné qu’après plus de 30 ans de carrière, il soit toujours aussi passionné, toujours excité de créer quelque chose – et j’ai adoré cela !

Dominique Pépin, son partenaire pendant plus de 30 ans, est un chef avec beaucoup de technique et de maîtrise. C’était donc une évidence que ce soit lui qui prenne le relais, puisqu’il s’agissait réellement d’un binôme dans la création et dans l’exécution.

dominique pépin
©Elodie Leneveupg

Y a-t-il un menu, un plat, un dessert ou une signature que vous voudriez présenter à nos lecteurs ?

L’anguille – que nous revisitons de temps en temps – est un intemporel de notre carte, elle a toujours été présente. On note par exemple la salade d’anguilles qui était une spécialité du chef et qui est quelque chose d’assez exceptionnel, surtout lorsqu’on pense aux a priori sur l’anguille : un poisson visqueux, qui ressemblerait à un serpent, qui pourrait avoir un goût de limon etc. 

De nombreux clients nous ont d’abord dit : « Ah non, l’anguille, je n’aime pas cela » et je leur réponds toujours, « Vous êtes sûr ? Vous devriez essayer, si ça ne vous plaît pas, c’est moi qui la paye » et en 11 ans, je n’en ai pas payé une seule !

Un client, un jour, m’appelle à table, et me dit : « Je suis assez mécontent, je suis même un peu énervé » – je lui demande, « Pourquoi, l’anguille ne vous a pas plu ? » – et il me répond « Non, c’est excellent, je ne peux rien vous dire et cela m’énerve un peu. »

Je pourrais également vous parler du bœuf poché, un bœuf avec une sauce au vin blanc de Montlouis. Bien souvent, on pense à marier un peu de bœuf avec du vin rouge, mais là c’est une sauce au vin blanc, ce qui est assez spécial.

Vous favorisez en majorité des produits locaux ?  

En effet nous travaillons beaucoup avec des produits locaux. 

Le caviar, par exemple, vient de Sologne, les esturgeons, viennent de cette même production.

©laurent Alvarez

Avez-vous un Cocktail signature ?

Nous avons un cocktail maison – Champagne et crème de mandarine ! 

Comme dans beaucoup de Relais & Châteaux, vous avez deux tables. Pourriez-vous nous les présenter ?

L’objectif est de proposer aux clients qui viennent au Château pour plusieurs jours une offre diversifiée. N’ayant pas nécessairement l’envie de manger tous les soirs dans un restaurant gastronomique, ou dans des restaurants que nous leur réservons autour du Château.

Lorsque Monsieur Cartier a racheté Les Hauts de Loire, nous avons discuté de ce sujet – avoir une deuxième table s’est présenté à nous comme une évidence. Cela permet d’abord de garder les clients au sein du Domaine mais également de toucher d’autres clients au niveau de la région.

Les deux offres sont complémentaires.

Le BistroT
©Romain Ricard

Votre école de cuisine s’inscrit-elle dans cette même logique ?  

L’objectif de l’école de cuisine était de proposer une activité supplémentaire aux clients – de leur proposer de travailler avec un chef 2 étoiles – ce qui est toujours agréable. 

C’est surtout Rémy Giraud qui continue à donner des cours. Je le disais précédemment, il est passionné et a toujours un tas d’idées. En partant d’une recette, celui-ci va pouvoir donner énormément de conseils. 

Il s’agit d’un cours très complet, Rémy se met à la portée des personnes qu’il a en face – nous avons des clients débutants et d’autres très férus de cuisine avec un très bon niveau – c’est toujours intéressant de voir la façon dont il parvient à se mettre au niveau de chacun et à leur transmettre cette passion qu’il a depuis des années. 

École de cuisine
©Christine Besson

Vous proposez cela tous les jours ?  

Aujourd’hui, nous proposons ces ateliers le samedi et le dimanche. Il y a un programme auquel les clients s’inscrivent et le premier dimanche de chaque mois est uniquement consacré aux enfants. 

Toujours sur la thématique de la cuisine – cette fois ci autour du repas de la maison Clarins. Pouvez-vous nous présenter ce projet ?

Monsieur Courtin est un passionné de cuisine, et possédant un SPA Clarins, l’idée était d’associer cette passion avec le savoir-faire du chef afin de décliner un plat et un dessert au Bistrot, autour d’éléments naturels qui reviennent régulièrement au sein des produits Clarins. Nous le faisons à chaque nouvelle carte.

Travailler avec La maison de Clarins sonnait encore une fois comme une évidence pour vous ?  

Monsieur Cartier avait de très bonnes relations avec la maison Clarins. 

Un jour, ces derniers sont venus nous rendre visite et nous avons jugé bon de recevoir un SPA Clarins. Outre le lieu, les relations que Monsieur Cartier avait avec Clarins qui ont permis l’installation de ce SPA. 

C’est en outre une très belle marque et nous sommes très fiers de travailler avec eux, parce qu’il existe peu de marques comme cela. Non seulement c’est une entreprise familiale française mais c’est également une entreprise qui travaille avec des produits naturels – nous partageons les mêmes valeurs. 

spa clarins
©Fabrice Rambert

Pouvez-vous nous présenter le Spa Clarins ?

Comme vous avez pu le voir avec, nous proposons, des soins du visage, des massages et des gommages corps. Nous pouvons également effectuer des soins de 30 minutes, d’une heure ou d’une heure trente, en fonction du choix du client. Nous laissons les clients choisir leur prestation à la réservation directement au spa ou sur la réception. Le client peut choisir une heure de soins – soit un soin visage soit un massage.

Nous réalisons davantage de massages. Nous avons le massage équilibre aux huiles essentielles par Clarins – toutes les huiles pour le corps et même pour le visage sont fait à base d’huiles essentielles. Dans ce massage, nous proposons trois huiles pour les soins : l’Huile Tonic à base de menthe, l’Huile Relax à base de camomille basilic, et l’Huile Anti-Eau à base de géranium. Ce sont des huiles sèches.  Aux clients de choisir.

Spa clarins
©Fabrice Rambert

Pouvez-vous nous en dire plus sur les différentes activités proposées au sein du Relais & Château ?

Au-delà de tout ce que nous avons déjà mentionné, nous avons une très belle piscine, un terrain de tennis, un kids club de golf, une salle de fitness et surtout – sur 70 hectares de parcs, nous avons trois étangs, la possibilité de faire du vélo, des ruches nous permettant de proposer notre propre miel, etc. 

Piscine
©fabrice rambert

Chez Icon-Icon, nous aimons parler d’expériences. Auriez-vous des expériences à proposer qui donneraient des raisons supplémentaires à nos lecteurs de choisir votre établissement ?  

Il y a de nombreuses activités à faire autour de notre établissement – par exemple nous pouvons vous proposer un vol en montgolfière vous permettant de survoler au minimum un château afin d’en avoir une vision différente. Vous pouvez également survoler les alentours en hélicoptère – une formule peut-être moins émotionnelle mais plus sensationnelle – avec la possibilité de visiter une dizaine de châteaux en une heure.

De retour sur terre, Le château de Chaumont propose le Festival des Jardins – un festival qui se tient d’avril à octobre chaque année sur un thème différent où une trentaine de jardiniers paysagistes présentent leurs créations. Chaque année, des visiteurs du monde entier se rendent dans notre région pour assister à ce festival.  Par ailleurs, le château abrite régulièrement des expositions d’Art Contemporain.

Finalement, vous pouvez bien sûr visiter les différents Châteaux tels que le Château de Chenonceau, le Château des Dames – classé au patrimoine de L’UNESCO et qui est géré par une femme, Madame Laure Menier. Vous avez bien sûr aussi dans les alentours des châteaux tels que le Château Chambord, le château de Blois et bien d’autres encore.

En quelques mots, quelle est votre vision de l’excellence à la française ?

Je suis quelqu’un qui parle davantage avec le cœur que la tête. Selon moi, c’est ainsi la gentillesse et la générosité qui priment ? Je ne sais pas s’il s’agit de quelque chose de typiquement français, mais nous prêtons une attention toute particulière aux détails, nous sommes continuellement attentifs à ce qui pourrait faire plaisir aux clients. 

Un jour, une cliente, dans un autre établissement où l’on pouvait arriver dans la Cour du Château, m’a dit, après avoir vu mon pin’s, « j’aimerais beaucoup avoir un pin’s comme cela ». Je lui ai alors répondu que pour avoir un pin’s comme cela, il lui fallait travailler pour nous car ce sont des pin’s réservé à mes équipes. J’ai alors demandé au maître d’hôtel de mettre deux tailles de pin’s – un petit et un grand – dans sa serviette et de faire en sorte qu’elle s’assoit à l’emplacement où ils avaient été cachés. Je me suis caché, comme lorsqu’on fait une surprise à un ami et que l’on veut voir sa réaction. Elle était très heureuse parce qu’elle est revenue l’année suivante et lorsqu’elle est sortie de sa voiture, elle avait le pin’s à la boutonnière. 

Finalement, je n’aurais pas de définition de l’excellence à la française parce que je ne théorise pas et que je ne suis pas très fan de tout ce qui est dogmatique, je suis davantage quelqu’un de pragmatique et je pense que l’on doit fixer notre attention sur ces petits gestes du quotidien afin de déceler ce qui pourrait faire plaisir à nos clients.

Avez-vous un dernier sujet que vous aimeriez aborder ?

Je suis très attaché à notre production de miel. Les abeilles sont en effet capitales pour la planète, nous faisons donc cela dans une visée éco-responsable mais également comme gage de qualité.

Nous travaillons avec des produits provenant de fermes alentours. Au petit déjeuner, les œufs, les yaourts et les fromages blanc viennent de la ferme. Nous avons donc beaucoup de produits qui proviennent de la région, nous cultivons également un potager – qui ne nous suffit pas à nourrir tout le monde, mais en revanche, tout ce qui provient du potager finit dans une assiette – celle des clients ou celle des équipes – selon les années. 

C’est donc cela notre métier, cette idée de partage – de partager une ambiance, une cuisine, un lieu, une région, une expérience – que vous pouvez ensuite raconter, vous remémorer les émotions procurées…

Si vous êtes tout seul à manger dans un 3 étoiles, vous pouvez bien sûr vous régaler, mais c’est tellement plus agréable de partager. Lorsque vous regardez un joli paysage, si vous pouvez échanger avec quelqu’un, faites-le ! 

Lorsque je vois mes clients le soir, je leur pose tout un tas de questions : Quel est votre programme ? D’où venez-vous ? etc. Parce que le partage est aussi extrêmement enrichissant.

Pour vous, l’art est-il une forme de partage ou amène-t-il à partager ?  

Bien sûr, l’art, selon la sensibilité de chacun déclenche une émotion. Et c’est exactement ce que l’on essaie de créer ici, des émotions – par l’assiette, par l’accueil, par un séjour. Donc forcément, l’art ne nous laisse pas indifférent. Que vous aimiez ou que vous n’aimiez pas, si cela vous laisse indifférent, c’est que peut être quelque chose a été raté dans l’œuvre ou bien que vous n’avez pas cette sensibilité-là. 

Effectivement, l’art procure une émotion supplémentaire et vient compléter le décor, l’ambiance.

Il existe beaucoup de belles choses, des sculptures, des décorations florales etc.

C’est comme le théâtre, il y a les costumes, les décors, la mise en scène, il y a tout ce que l’on prépare dans les coulisses. Et puis après, on joue la pièce, et à un moment donné, le spectateur monte sur la scène et joue la pièce avec nous, et c’est cela la chance de notre métier.

Propos recueillis par Sébastien Girard

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