Givenchy et Issey Miyake, Deux Ruptures Dans La Haute Couture

Givenchy et Issey Miyake, Deux Ruptures Dans La Haute Couture

A des époques différentes, et de façons très différentes, Hubert de Givenchy et Issey Miyake ont conduit la Haute Couture et le vêtement vers des chemins rarement explorés. Le premier a fait des merveilles dans la simplicité des matières. Le second a, lui, donné forme et vie aux matières mêmes.

La maison Givenchy a fait de la coupe sobre un moyen de magnifier la femme. Issey Miyake a donné vie aux vêtements, taillant dans des matières innovantes de nouveaux chemins pour la couture.
Ainsi, l’un comme l’autre ont tenu à explorer des façons inédites et convaincantes de faire de la mode. Une mode qui, d’ailleurs, reste imperméable aux tendances.

Hubert De Givenchy, Le Maestria de la Couture

Il tient de son apprentissage chez Jacques Fath et Lucien Lelong – deux lions de la Haute Couture – un oeil expert pour les lignes et le goût des belles étoffes. Chez Elsa Schiaparelli, on peut supposer qu’il a pris goût à la fantaisie. Mais disséminée avec la mesure qu’on lui connait.

Givenchy, Elegance Et Pureté

Lorsqu’il inaugure sa maison en 1952, Hubert de Givenchy rompt immédiatement avec les codes de son époque. En effet, c’est dès cette première collection qu’il introduit la blouse Bettina. Condensé du style Givenchy — une blouse en shirting à l’élégance espiègle. Mais là où Givenchy impressionne, c’est dans la pureté de l’élégance que ses robes distillent.

En avance sur son temps, Givenchy va ainsi offrir aux élégantes des pièces changeantes, telle sa robe du soir avec corsage amovible. L’idée? L’associer avec une jupe droite ou un pantalon. Avant Yves Saint Laurent, Givenchy avait déjà pensé au chic d’un tel vêtement.

Des robes du soir ou de bal, très raffinées, où les lignes sobres sont contrebalancées par des volumes très Balenciaga. En effet, comme nombre de couturiers de l’époque, Givenchy admire Balenciaga. Lorsqu’il le rencontre en 1953, les deux couturiers se retrouvent et s’apprécient mutuellement. Ils ont en commun leur recherche de la perfection, autour, sinon de l’ornementation, de la pureté de la ligne.

L’autre point commun avec Balenciaga, c’est l’amour du noir. Une couleur qui va s’ancrer au panthéon de la mode avec une certaine Audrey Hepburn, et sa petite robe noire.

La Petite Robe Noire, Un Vêtement De Cinéma

Hanches fines, corps sensuel accentué par les lignes, et raffinement dans l’encolure bateau… La grammaire Givenchy était parfaite pour Audrey Hepburn.

La rencontre se fait sur un malentendu – Givenchy pensant d’abord avoir affaire avec Katharine Hepburn. Audrey Hepburn fut envoyée vers Givenchy par un Balenciaga débordé. Mais la relation entre ces deux icônes du style sera impressionnante. Il dessine ainsi les costumes du film Sabrina, en 1954, par Billy Wilder.

Des pièces distillant toute la sophistication moderne et praticable de Givenchy. Des pièces entrées dans la mémoire de la mode, tant les designers aujourd’hui encore s’en inspirent.  Les costumes pour le film Sabrina furent bien récompensés, par un oscar donné à… Edith Head, mythique costumière à Hollywood. Mais Givenchy, le gentleman, n’en fit pas une affaire.

« C’est Hubert de Givenchy qui m’a donné un look, un genre, une silhouette. Habillée par lui, je n’ai peur de rien » disait Audrey Hepburn. La pièce qui va ainsi définitivement associer Givenchy et le cinéma, c’est la mythique petite robe noire.

C’est elle que l’on retient de l’ouverture du film Breakfast At Tiffany’s. Une allure à la sophistication si parfaite. Une robe aux lignes si pures. Une Audrey Hepburn au sommet de ce chic tout en espièglerie qui a fait sa réputation… Givenchy est le maître de l’élégance, cinématographique !

Jean Seberg dans Bonjour Tristesse. Michèle Morgan dans Oasis, Elizabeth Taylor dans Hôtel International, ou encore La Panthère Rose et Charade… Le génie Givenchy se projette si parfaitement sur grand écran.

Au tournant des années 70, c’est un de ses anciens apprentis, qui va amener la couture encore plus haut.

Issey Miyake, La Couture En Mouvement

Issey Miyake inaugure sa maison en 1974. Il est alors habité par une recherche qui ne le quittera jamais. Le futur, et le mouvement. « Mon regard se porte toujours vers le futur, jamais vers le passé. J’ai la conviction profonde que le bonheur et la joie résident dans cette perspective positive. »

Issey Miyake, S’Afranchir Pour Réinventer La Couture

Formé auprès de Guy Laroche et Givenchy, Issey Miyake s’est rapidement affranchi des règles et de l’héritage, parfois lourd, de la Haute Couture. Lui, le Japonais, ira plus loin qu’aucun couturier de sa génération dans le travail de la coupe, et le mouvement du vêtement. Ce qui souhaite, aussi, c’est l’établissement d’une silhouette qui ne soit ni Occidentale, ni du Japon.

« Mes premières années à Paris ont été importantes pour moi car elles ont servi de tremplin à ma carrière, les notions de beauté et d’esthétique du corps humain restent trop rigides pour moi. Heureusement, les perceptions se trouvent bouleversées par le vent de liberté qui soufflait en 1968. » C’est bien la révolte estudiantine et les libérations qui s’en suivent qui rassurent Issey Miyake dans son raisonnement.

L’air du temps souffle de son côté. Comme pour cette nouvelle génération, les conventions bourgeoises ne lui vont plus. Issey Miyake préfère travailler des vêtements amples et fluides — des vêtements qui explorent une notion clé de la grammaire Miyake: le mouvement.

« Toutes mes recherches ont toujours été centrées sur le mouvement et la liberté permise par le vêtement. La personne qui le porte lui confère sa dimension finale » explique-t-il.

Pour se faire, il fallait à la maison Miyake des tissus à la hauteur de ses ambitions. Il travaille ainsi de concert avec son directeur de textile, Makiko Minagawa. Il donne vie en tissu aux idées abstraites d’Issey Miyake.

La maison qui porte son nom est ainsi parvenue à accompagner cette transition entre la Haute Couture et le prêt-à-porter, sans céder aux sirènes de la mode utilitaire. Le style Miyake? Des silhouettes amples, et fluides. Travaillées autour de couleurs vives et d’éléments qui donnent vie.  Celui que l’on surnomma le “couturier volant“ est parvenu à son objet, en 1993.

La Révolution Pleats Please

En 1993, la collection d’Issey Miyake connait un profond retentissement. C’est la révolution Pleats Please. Sa ligne iconique est née.

Avec ses tissus plissés, et un travail exceptionnel réalisé par son directeur de textile, Makiko Minagawa… La maison introduit un tissu inédit qui met le vêtement en mouvement, dans un style à la fois organique et sculptural.

Le succès n’est pas qu’éditorial mais bien commercial ! Celui qui admirait les photographies de Richard Avedon et Irving Penn, travaille avec le second à l’élaboration de son iconographie. Issey Miyake vient d’inscrire son nom dans l’histoire de la mode.

Mieux, en 1998, il réitère avec la ligne A-POC ( A Piece of Clothe). Avide d’expérimentations et de nouveautés dans les tissus, il imagine cette fois des vêtements fabriqués à l’aide d’une machine à tisser, et une seule. Les coutures prédéfinies à partir de tubes de tissu, le client d’Issey Miyake n’a plus qu’à couper lui-même son vêtement.

Sorte de vêtement interactif avant l’heure. Et notamment avant le génie conceptuel d’Hussein Chalayan… Une couture qui vit donc, et une couture qui épouse les innovations — celle d’Issy Miyake partage avec celle de Givenchy la recherche de l’allure et du mouvement dans la simplicité des lignes.

Deux ruptures dans l’histoire de la couture qui ont, aussi, comme point commun celui de proposer un style inimitable… ancré par delà la mode et la saisonnalité des goûts

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