Des Etoiles Et Des Chefs: Paul Bocuse

Des Etoiles Et Des Chefs: Paul Bocuse

Disparu en Janvier 2018, le Chef Paul Bocuse a laissé derrière lui nombre d’innovations culinaires qui ont mis la gastronomie sur la voie de ce que l’on nomma la Nouvelle Cuisine. Des innovations, mais aussi une vision simplifiée du goût et du bon — Paul Bocuse est, à raison, considéré comme le Pape de la Gastronomie Française.

Paul Bocuse, Un Destin de Grand Chef

Le premier Chef de l’histoire de Michelin a se voir attribuer 3 étoiles, fut aussi celui par qui la révolution culinaire est arrivée.

L’Héritage Familial Et Une Vision Très Personnelle de la Cuisine

Si le nom de Paul Bocuse est internationalement reconnu aujourd’hui, les traces historiques de ce nom associé à la cuisine remontent, elles, au XVIIIème siècle. Paul Bocuse est en effet l’héritier d’une véritable passion familiale — dans le domaine de la cuisine, le nom de sa famille résonne depuis plusieurs générations. Celui-ci était surtout connu de la région Lyonnaise, d’où il est originaire.

La filiation fut maintenue, par ses parents et grands parents. Aussi bien du côté paternel que maternel, la famille Bocuse avait fait sienne l’hôtellerie et la restauration. A Collonges-au-mont-d’Or, village où Paul Bocuse a grandi, c’est dans l’auberge de ses parents qu’il s’initie et goûte aux premiers amours de la cuisine. Là, proche de la nature, il apprend les rudiments de la pêche, de la chasse mais surtout… Paul Bocuse y apprend la puissance des saveurs et la multitude d’aliments et de possibilités qu’offre la nature !

Plus d’une fois lors d’interviews, il s’en amuse ainsi, en affirmant: « La cuisine c’est ma vie. Je connais mieux les sauces que ma géographie. »

Porté par cette vocation, Paul Bocuse va débuter sa carrière d’apprenti auprès de l’une des « mères de Lyon », Eugénie Brazier. Elle lui enseigne alors les méthodes et techniques de la gastronomie des restaurants traditionnels lyonnais, les bouchons lyonnais.

Fort de ce terreau riche en savoir-faire, il travaillera ensuite dans plusieurs restaurants pour de grands Chefs cette fois. Gaston Richard, Paul Mercier ou encore Fernand Point, lui qu’il prend comme maître à cuisiner.

En 1958, il fait le choix de reprendre l’auberge de ses parents — c’est là, à Collonges-au-mont-d’Or, qu’aujourd’hui brille toujours le nom de Paul Bocuse. Oui car, dès son arrivée en 1958, il fait siens l’établissement légué par ses parents, l’Auberge du Pont de Collonges.

Paul Bocuse va alors y distiller sa vision de la gastronomie. Des produits simples, presque trop simples pour l’époque.

Une Vision Simplifiée de La Très Bonne Cuisine

La légende raconte que deux jeunes critiques, Henri Gault et Christian Millau, se rendirent chez Paul Bocuse. En savourant des haricots aux échalotes assaisonnés d’une goutte d’huile d’olive, ils auraient dit: « Nous assistons à la naissance de la Nouvelle cuisine. »

Nouvelle cuisine. C’est bien cette expression qui va longtemps catégoriser le style Paul Bocuse. Parce que le Chef abandonne d’abord nombre des conventions de la grande cuisine traditionnelle. Ensuite, parce que Paul Bocuse visait une cuisine simple, épurée au possible. Dans tous les sens du terme — sa nouvelle cuisine innovante mettait ainsi l’accent sur les légumes légèrement cuits, une utilisation économe de vinaigrettes et de sauces à base de matériaux pauvres en graisses… Et une présentation astucieusement simple !

Face à certaines des extravagances plus riches et plus caloriques de la grande cuisine Française dite classique, celle de Paul Bocuse apparaissait en avance sur son temps. Mais, comme pour s’éloigner de cette étiquette, il aimait à asséner : « Il n’y a qu’une cuisine : la bonne ! »

En cherchant à mettre en valeur les saveurs naturelles, les textures et les couleurs des aliments, il a bien entériné une vision quelque peu surannée. Et le succès fut immédiat.

En 1958, année de la reprise de l’auberge familiale, il reçoit sa première étoile au Guide Michelin. En 1961, il est honoré du titre de Meilleur Ouvrier de France. En 1962, c’est la seconde étoile. En 1965, il est le premier Chef de l’histoire à recevoir les 3 étoiles du Michelin — un graal tant convoité ! Ce fut alors le début d’une myriade de récompenses venant célébrer sa vision fraîche, légère et la clarté des saveurs que sa cuisine laisse éclater.

Paul Bocuse fut encore désigné « Pape de la Gastronomie » par Gault et Millau en 1989 et « Chef du Siècle » par l’Institut Culinaire d’Amérique en 2011…

Les Plats Signatures de Paul Bocuse: Entre Simplicité et Amour des Bons Produits

« La vraie cuisine sera toujours celle du terroir. En France, le beurre, la crème et le vin seront toujours les bases. » Une citation comme une philosophie — la cuisine de Paul Bocuse fait la part belle à la simplicité et aux bons produits.

Un amour des plats simples qui trouve un ressort plus créatif encore dans la haute cuisine. A cela, son plat sans doute le plus iconique parle de lui-même. La soupe à la truffe noire VGE, comme Valéry Giscard d’Estaing. Comment est née la soupe VGE?

Le 25 février 1975, Paul Bocuse est élevé au rang de Chevalier de la Légion d’Honneur par le président Français Valéry Giscard d’Estaing. A cette occasion, le Chef compose un banquet à l’Elysée pour le président et son épouse.

Il annonçait alors, non sans un trait d’humour : « Monsieur le Président, nous allons casser la croûte. »

Et en effet, pour atteindre le met, il fallait d’abord briser la coiffe fait d’un généreux feuilleté.

Ce n’est que plus tard que Paul Bocuse livrera l’inspiration derrière son plat signature. Il avait mélangé deux inspirations, une soupe de poulet et bœuf aux truffes qu’il avait goûté avec des fermiers ardéchois, et une truffe recouverte d’une croûte que son ami Paul Haeberlin avait un jour cuisiné pour lui.

Sa réputation n’est plus à faire; son mythe, lui, est en marche ! En 1980, aux Etats-Unis, c’est le parc d’attractions Disneyworld à Orlando qui lui commande une cuisine à son image pour le pavillon Français. Une cuisine palpitante et fraternelle ! Une cuisine que Paul Bocuse tient surtout à transmettre.

La Transmission de Monsieur Paul

A un journaliste qui l’interroge, « Comment aimeriez-vous qu’on se souvienne de vous, en tant qu’innovateur ou en tant que professeur inspirant? » Paul Bocuse répondait: « En tant que chef qui a transmis ses connaissances aux jeunes générations. »

Le « père de la cuisine Française » – pour reprendre l’expression donnée par Alain Ducasse – a en effet cherché à transmettre ses compétences, dès les années 90. Paul Bocuse inaugurait alors l’institut Paul Bocuse, une école hôtelière où des étudiants de 37 pays différents se forment aux bases de la gastronomie Française.

Bientôt, les Instituts Paul Bocuse ouvrent à Shanghai, en Chine. On y distille toute la rigueur et la vision qui amenèrent Paul Bocuse à révolutionner la cuisine. Une vision de partage qui se comprend aussi dans le Bocuse d’Or, initié en 1987 comme un concours mondial de la cuisine.

Voici finalement tout le lègue d’un Chef éminemment généreux qui demeure celui par qui l’excellence culinaire Française a pris une toute autre symbolique.