Cet été, KENZO présente la nouvelle version de sa fragrance iconique FLOWER BY KENZO L’Absolue. Pour cette occasion, la Maison a choisi une ambassadrice engagée : Masami Charlotte Lavault.
« Les fleurs sont le luxe de la nature »
En 2013, après avoir travaillé plus de dix ans en tant que designer industriel à Londres, cette franco-japonaise décide de tout quitter pour revenir à Paris et installer la première ferme florale au cœur de la capitale.
Son leitmotiv : cultiver des fleurs de façon durable et transmettre sa passion au plus grand nombre.
Loin d’imaginer le succès qu’elle allait rencontrer avec son projet, Masami Charlotte Lavault est aujourd’hui l’ambassadrice de la nouvelle fragrance FLOWER BY KENZO L’Absolue imaginée par Alberti Morillas. Sur le point d’ouvrir sa deuxième ferme et sa « School Flower » avec l’aide de la Maison KENZO, elle est également le visage de la nouvelle image Kenzo « pour un monde plus beau ».
Rencontre avec une passionnée, à la croisée du luxe et de la préservation de l’environnement
Pour commencer, pourriez-vous revenir sur votre parcours et la naissance de votre projet d’une ferme florale en plein Paris ?
Je m’appelle Masami Charlotte Lavault, mon nom est moitié français, moitié japonais.
Il y a 10 ans, j’étais designer industriel pour des voitures, des lunettes, et d’autres objets qui nous entourent. Ce que l’on faisait, c’était du fast-design – il fallait travailler très vite, très mal, et il n’y avait pas du tout de prise en compte au niveau de l’écologie, ce qui m’a beaucoup attristé.
Bien souvent, quand on pose des questions sur la reconversion, les gens ont une vision très douce et très heureuse de ce revirement, mais dans mon cas, on est surtout dans un constat plutôt négatif. Donc tout d’un coup, j’ai décidé d’arrêter.
En trois semaines, j’ai démissionné de tous mes postes – j’étais en free-lance donc ce n’était pas vraiment un problème – et j’ai décidé de partir travailler dans des fermes. Ce revirement a eu lieu en 2013, je suis allée travailler dans des fermes au Maroc, en Angleterre et au Japon. Tout cela m’a pris environ un an et demi.
Je suis ensuite revenue vivre à Paris, ma ville natale, en me disant très naïvement que j’allais réussir à y créer ma propre ferme. C’était plutôt positif d’être super naïve puisque si j’avais été plus consciente des difficultés, je ne sais pas si je me serais accrochée. Le parcours a été long : trois ans avant de trouver un premier lieu puis il y a cinq ans, j’ai enfin trouvé mon lieu définitif : la ferme à Belleville.

Pour moi, l’agriculture était une forme de création parce qu’à partir d’ingrédients éparses, on fait émerger quelque chose qui n’était pas là avant. C’est à partir de la terre, d’une graine, du soleil, de l’eau et d’énergie humaine qu’on fait émerger des plantes qui n’étaient pas là avant.
A l’origine, le design pour moi c’était un peu ça : pour un objet en céramique par exemple – à partir de terre, d’eau, d’énergie humaine et du feu – on fait émerger une assiette ou une tasse.
La différence, dans agriculture telle que je la pratique aujourd’hui, c’est que l’importance est de préserver les ressources et ce n’était pas une préoccupation centrale dans le design tel que je le pratiquais à l’époque. Pour moi, l’agriculture m’apparaissait de façon très logique comme étant le meilleur de la création avec tous les inconvénients que la vie d’ordinateur impose – être tout le temps assise dans des bureaux, enfermés dans des studios.
Aujourd’hui effectivement je vis tout le temps dehors – ça a d’autres inconvénients mais c’est quand même assez vivifiant et je me suis affranchie de cette vie tout le temps passée à l’intérieur.
Pourquoi avez-vous choisi de rester à Paris ?
Je n’ai pas vraiment de lien avec la ruralité française. J’ai toujours vécu à Paris, je ne connaissais plus grand monde en France après quasiment 10 ans d’absence et les seules personnes françaises avec qui j’étais restée en contact étaient à Paris. Je me suis donc dit « Rentre chez toi » et chez moi, c’est Paris !
En ayant travaillé dans des fermes, j’ai tout de suite perçu – et ce n’est pas difficile à voir – l’énorme charge économique et mentale que ça représente d’être agriculteur et surtout d’avoir sa propre ferme. Je me suis donc dit « Ne va pas t’isoler dans un endroit où tu connais personne ». M’installer en milieu rural m’aurait ajouté une contrainte sociale mais m’aurait allégée des difficultés à cultiver en milieu urbain.
Franco-japonaise, vous semblez incarner à la perfection l’image et l’héritage KENZO, pourriez-vous nous parler de votre vision de la marque ?
En fait c’est assez mignon. Quand on était adolescentes, ma sœur, Akira, portait le parfum dont j’incarne l’image aujourd’hui. C’est un souvenir olfactif assez ancien pour moi.
Kenzo Takada est arrivé en France 15 ou 20 ans avant ma mère, mais pour moi il représentait le monde des Japonais qui vivaient à Paris dans les années 80. Il évoquait ma mère, tous ses amis artistes, musiciens. C’était un univers assez particulier et qui a bien changé aujourd’hui parce qu’il y a beaucoup plus de Japonais qui vivent ici, de façon complètement diversifiée.
A l’époque, les communautés étaient quand même assez marquées et beaucoup moins mélangées. Les gens comme nous, les « moitié-moitié », il n’y en avait pas tant que ça, c’était vraiment une toute petite communauté que je retrouvais dans ce que Kenzo Takada était.

Vous semblez avoir été surprise d’être approchée par KENZO pour représenter cette nouvelle fragrance. Pourtant cette rencontre semblait être une évidence… Pourriez-vous nous en dire plus sur cette collaboration ?
Pour moi, c’était complètement inimaginable. Au début j’étais très surprise, j’ai beaucoup hésité parce que je me suis dit que le luxe n’était pas du tout mon monde et ma conception du monde du luxe était plutôt à l’inverse de ce que je vivais dans le cadre de mon agriculture. C’est ça qui est intéressant.
Ce qui m’a séduite, plus parce que ça m’a émue, c’est que lorsqu’on a grandi en France, la pub de Flower by KENZO était la seule campagne que je voyais où il y avait une femme asiatique qui était représentée et qui n’était pas une cuisinière pour un restaurant chinois ou une cueilleuse de riz dans des rizières. Je m’en souviens très bien. Rien que pour la représentation, je trouvais ça chouette que ça fasse un full circle et que ce soit moi qui, 20 ans plus tard, incarne cette image-là. Aujourd’hui encore, on a besoin de voir des images plus diversifiées de ce que c’est que la beauté, de ce qui mérité d’être regardé, de ce qui est considéré comme beau ou belle.
Je trouvais ça chouette comme proposition venant d’une marque comme ça parce qu’on voit cela dans les plus petites marques mais quand les grandes marques font cela, je trouve que ça a un impact très fort. C’est ça que j’aime chez KENZO : c’est une petite maison dans le grand groupe LVMH mais c’est une maison qui a vraiment envie de faire évoluer l’idée du luxe.
Ensuite, ce que j’aime aussi dans cette collaboration aussi c’est que ce n’est pas que de l’image. Au-delà d’être une campagne de communication, c’est aussi un vrai engagement qu’ils ont scellé avec moi. En effet, ils vont m’aider à développer le projet de ferme et leur engagement écologique était pour moi la condition sine qua none de tout travail commun.
Il y a donc une connivence d’image mais également une connivence de valeurs.
D’eux-mêmes, ils m’ont demandé ce qui pourrait permettre à ma ferme ou à mon travail agricole de progresser et d’évoluer grâce à eux. Et ça c’est vraiment sur le long terme parce que une ferme ça ne se fait pas en trois jours. Nous sommes donc partis sur un partenariat autour de la nouvelle ferme que je suis en train de monter en banlieue de Rambouillet, à Sonchamp. Ce sera une ferme florale qui s’appellera « Des fleurs de Sonchamp », comme ce que j’ai à Paris sauf que ça fera 5 hectares – soit 50 fois plus grand. Cette ferme sera une ferme de production florale et il y aura aussi tout un volet pédagogique donc ce sera aussi une ferme-école que KENZO appelle « La Flower School ». Ce sera un endroit où on apprend à cultiver des fleurs de façon responsable. J’ai mis 10 ans à apprendre à faire ce métier et je suis contente qu’on transmette ça rapidement à d’autres.
Comment réussir à sensibiliser les consommateurs « à un monde plus beau », sans pour autant adopter un discours punitif ou au contraire n’être qu’une image marketing ?
Sans vouloir prêcher pour ma paroisse, je trouve que les fleurs sont un support génial pour ça. Les fleurs ont un côté assez luxueux en soi, c’est le luxe de la nature. La beauté des fleurs réside également dans le fait qu’elles soient gratuites : c’est un cadeau.
Il y a d’ailleurs une très jolie phrase qui dit que « les fleurs sont le sourire des plantes » et c’est ça : les fleurs sont un sourire de la nature qui nous dit « regarde ça comme c’est joli ». Les fleurs ont plein de fonctions biologiques et permettent de nous rappeler qu’il faut regarder la vie qui passe.
Selon moi, sensibiliser les gens à l’écologie ça se fait par la séduction plutôt que par le mode punitif et le reproche. Je trouve ça chouette de pouvoir inviter les gens, de les prendre par la main doucement en leur disant « viens on va regarder des fleurs ». Et ça marche ! Il y a énormément de femmes qui m’écrivent en me disant « J’ai lu un article sur vous et ça me donne envie de quitter mon job ! ».
Lorsque j’ai commencé, j’étais à 1000 lieues de me dire que ça allait marcher. Et aujourd’hui, on est arrivé à un point où il faut qu’on ouvre une école pour pouvoir accueillir les personnes qui manifestent leur intérêt pour le projet.
Le coquelicot, présent depuis les années 2000 chez KENZO, est devenu un véritable emblème pour la Maison. Avez-vous un lien particulier avec cette fleur ?
D’abord, ce que j’aime chez le coquelicot, c’est le fait que ce soit une fleur des friches – souvent des friches urbaines. Biologiquement parlant, c’est une fleur qui arrive quand le sol a été dérangé, appauvri ou retourné. Il se contente d’un sol très sec, là où d’autres plantes n’arriveraient pas du tout à s’implanter. Les coquelicots ont donc une forme de courage botanique hyper impressionnant.
Ce sont des plantes sont très résilientes donc d’un point de vue purement anthropomorphique, quand on calque nos émotions sur les coquelicots, c’est assez beau.
Ensuite, ce que j’adore, c’est que les coquelicots font partie des fleurs qui éclosent très vite, et qui meurent aussi très vite.
Leur caractère éphémère les rend porteur du message suivant : « Vis, maintenant et tout de suite, parce que ça va s’arrêter très vite ».
J’ai cultivé des coquelicots dans mon champ à Paris. Pour pouvoir récolter des coquelicots – chose qu’on ne fait pas d’habitude car les coquelicots sont réputés pour ne pas tenir – je faisais d’assez grosses bottes, et je disais aux gens « Regardez, ça va être un peu comme télécoquelicot : vous allez pouvoir voir, en temps réel et à l’œil nu, la fleur éclore et un jour plus tard elle sera morte mais il y en aura d’autres qui vont suivre et c’est un vrai spectacle à regarder chez soi ».
Quelle relation entretenez-vous avec le parfum ?
Le parfum est très présent dans mon entourage puisque je suis entourée de fleurs qui exaltent tout un tas d’odeurs – plus ou moins agréables d’ailleurs.
Par contre, moi, j’en porte très rarement. C’est vraiment un geste de fête, quelque chose d’exceptionnel. Je ne me parfume pas quotidiennement.
Occasionnellement, quand je suis hors du champ, c’est le seul moment où je m’offre le luxe de mettre du parfum.
De même, je refuse d’écouter de la musique quand je travaille au champ parce que j’aime pouvoir entendre ce que dit le champ. Pour le parfum c’est pareil : j’aime avoir une sorte de silence olfactif sur moi pour pouvoir sentir au quotidien ce qui se passe dans mon champ.
Pour finir, chez Icon-Icon, nous nous intéressons aux produits, aux lieux, aux expériences emblématiques, y a-t-il une odeur, un souvenir, un endroit ou même un objet qui ne vous quitte pas ou qui vous a marqué dans votre vie et que vous aimeriez partager avec nous ?
Quand j’ai effectué ma reconversion professionnelle, je travaillais dans des fermes. Dans une des fermes en Angleterre, j’étais souvent chargée de l’arrosage des plantes dans la pépinière. Les pépinières ont une odeur très particulière car il y a de la terre mouillée et les plantes respirent beaucoup. Cette odeur de chlorophylle et de terre est restée dans mes narines. Quelques années après, quand j’ai eu ma propre ferme, j’ai eu ma propre pépinière et j’ai retrouvé l’odeur de ma propre pépinière.
Tous les jours, quand je rentre dans cet endroit, pour moi, c’est l’odeur d’avoir réussi à réaliser mon rêve, c’est l’odeur de la fierté.
FLOWER BY KENZO L’Absolue sera disponible dès le 20 juin.
Propos recueillis par Sébastien Girard, Président d’Icon-Icon et Saskia Blanc
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