Les Demoiselles d’Avignon Picasso, c’est l’œuvre qui a ouvert les yeux du monde sur de nouvelles perspectives artistiques ! Et c’est le travail d’un des plus grands génies de l’art, dont le portrait se dévoile ici.
Les Demoiselles d’Avignon Picasso : Icône du MoMa
Créée pour un nouveau siècle, Les Demoiselles d’Avignon de Picasso a conduit le monde à réaliser que l’art n’est pas une copie de la nature, mais plutôt un parallèle à celle-ci.
A Paris, au Centre Pompidou, un événement majeur est à l’oeuvre en 2018 – la première exposition consacrée au cubisme tenue en France depuis 1953. Parmi les œuvres exposées d’artistes désormais révérés, de Georges Braque à Marcel Duchamp, une peinture cruciale manque. Celle qui, en 1907, a ouvert le dialogue sans précédent entre la projection de l’artiste sur le monde et sa perception commune.
Grotesque pour certains, attrayante pour la plupart, Les Demoiselles d’Avignon a ouvert la porte à une multitude de styles artistiques avant-gardistes – elle continue à le faire aujourd’hui.
Le tournant du XXe siècle est arrivé avec une atmosphère éblouissante – l’Exposition universelle de Paris de 1900 a impulsé la modernité. La ville était en effervescence, le métro roulait à toute allure ; les expositions coloniales stimulaient l’imagination comme jamais auparavant… Les possibilités semblaient infinies, tandis que les premières photographies capturaient le temps. À Montmartre, George Braque (1882-1963) et Pablo Picasso (1881-1973) étaient alors deux jeunes artistes sur le point de propulser des changements radicaux – si la photographie transcrit la nature telle qu’elle est, que reste-t-il à faire pour la peinture ?
Les Demoiselles d’Avignon, enracinées dans la grande tradition de la peinture, mais défiant farouchement ses canons, ont exposé le monde au XXe siècle : brutal, révolutionnaire et effrayant.
Les premiers à le voir dans son atelier étaient horrifiés et choqués. Les collègues avant-gardistes de Picasso n’étaient pas d’accord. Pour eux, cela ne pouvait pas être étiqueté comme de l’art. Mais ce qui se cache derrière cette production non conventionnelle est l’ambition de toute une vie de Picasso : faire l’histoire de la même manière que les grands maîtres l’ont fait avant lui. Pour lui, devenir l’artiste du XXe siècle signifiait concevoir une réalité en phase avec la modernité. En trouvant son sujet dans la grandeur du nu, Picasso s’est lancé dans deux années d’un processus préparatoire intense.
La peinture a été modifiée trois fois avant de devenir le chef-d’œuvre exposé au New York MoMa.
Si La Grande Odalisque (1814) de Jean-Auguste-Dominique Ingres et Olympia (1863) d’Edouard Manet sont reconnues comme des représentations précises de l’idéal sensuel de leur époque, alors Les Demoiselles incarne également les idéaux de l’explosive modernité. Pourtant, au-delà des souvenirs d’un bordel dans la vieille ville de Barcelone, elle a beaucoup plus à dire. Les angles vifs et la perspective brisée font un clin d’œil à Cézanne. Les silhouettes géométriques et le sens de la couleur piquant sont influencés par Matisse ; piquant ici une pose de la Belle Endormie, là un geste de la Vénus endormie de Giorgione… Chacun des visages des cinq femmes renvoie à une tradition artistique vénérable.
Du côté gauche, une perspective de profil dans un style de peinture égyptien ancien encadre la peinture, tandis qu’au centre, les lignes sont empruntées au style classique ibérique. Mais les deux dernières femmes sont les plus intéressantes, présentant des visages déformés rappelant la récente découverte de l’art africain et des masques par l’artiste lors de l’exposition coloniale de Paris en 1907.
C’est le génie de Picasso : différentes traditions, styles et influences découpés, tordus et combinés pour poser les fondations d’un changement radical dans l’esthétique souhaitée.
Lorsque Les Demoiselles d’Avignon a fait sa première apparition publique au Salon d’Antin en 1916, la toile de 96 par 92 pouces a encore inspiré des critiques hostiles. Dans le journal Le Cri de Paris, un journaliste a noté : « Les Cubistes n’attendent pas que la guerre se termine pour commencer les hostilités contre le bon sens. […] M. Picasso, leur chef […] a peint, plutôt badigeonné, cinq femmes qui sont, pour dire la vérité, toutes tailladées… »
Ces cinq femmes ont ouvert la voie à toutes les révolutions stylistiques du XXe siècle : Orphisme et Futurisme, Dada et Surréalisme, Pop Art et Expressionnisme abstrait… De quoi donner tort à nombre de critiques de la modernité !