Un tissu devenu classique et insolite à la fois, déclinable à l’infini et indémodable à travers le temps. Le denim s’est révélé tel un tissu éternel et universel ; il incarne un mythe, une icône et un style à lui seul. Né d’une collaboration entre Levi Strauss et Jacob Davis, le jeans apparut lors de la ruée vers l’or, en 1853. Dans un contexte où praticité et durabilité étaient de rigueur pour un vêtement, ce pantalon fait d’un tissu résistant et confortable était alors d’une précieuse évidence. Levi Strauss utilisa, de premier instinct, ses toiles destinées à confectionner tentes et couvertures de wagons. Il s’inspira ensuite d’un solide tissu de coton à armure de serge, fabriqué en France, à Nîmes. Le denim est un tissage renforcé et très serré, fabriqué à partir d’une trame écrue ou blanche et d’une chaîne teinte en un bleu indigo, le bleu de Gênes. Le succès de ce pantalon est immédiat auprès des paysans, mineurs et cheminots du pays. En 1873, Levi Strauss complète sa création de quelques détails : les surpiqûres faites d’un fil orange et les deux poches arrières rivetées, qui optimisent la solidité et la tenue du vêtement. Il dépose alors un brevet, et créé en 1890 le mythique 501, le jeans 5 poches.
Attribut du monde travailleur et du rêve américain, le jeans a su se féminiser et se populariser. Traversant les décennies et constamment réinventé, il est partout. Emblème de James Dean et des Beatniks bikers, révélateur de la sensualité voluptueuse de Marilyn Monroe, ou encore caractéristique de Joe Cocker dans ses années Woodstock, le jeans se façonne et se personnalise. Selon les sentiments d’appartenance identitaire et d’individualité de chacun, il peut être brodé, clouté, tailladé, ou encore délavé, brossé et impeccablement repassé : il est presque le reflet d’une âme.
De par ses vicissitudes, le jeans transcende les genres, les styles et les âges. Une inclination et une multitude de possibilités que certaines maisons de couture, telle Chanel, ont perçu et investi avec précision. Dans le défilé Printemps-été 2013, Chanel présente une robe en jean particulièrement insolite. Elle apparaît telle une ré-interprétation de la première jupe en denim. Obtenue dans les années 60 en fendant un jeans et en cousant les empiècements évasés entre les quatre pans des jambes, elle fut le symbole de la féminisation de ce tissu à l’origine masculin. Aujourd’hui, Chanel la propose en une simple robe bustier, jouant sur la transition des catégories vestimentaires. Deux poches raglan en biais sont ajoutées sur les hanches, une ceinture de cuir ornée de perles perfectionne le haut du bustier : la jupe en denim devient une robe «couture». Autre singularité, les deux poches arrières emblématiques du jeans sont placées sur le devant de la robe, par un jeu fantaisiste entre le devant/derrière de pièces iconiques. Telle une exégèse contemporaine du jeans, la robe en denim de Chanel s’affirme tout en contraste et délicatesse, finesse et simplicité.
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