Maître des podiums dans les années 1990-2000, il signait la nouveauté d’une mode masculine enterrée par des siècles inchangés. Hedi Slimane balaie l’inertie pour donner une évolution radicale de la silhouette masculine, comme on en avait plus vu depuis Giorgio Armani dans les années 1970. Ce langage aux références rock, british mêlé à la précision d’une coupe qui épouse les corps de frêles hommes au regard noir, fût repris par bon nombre d’autres marques, déclassant le prêt-à-porter dans la rue et inventant le nouveau parisien de notre temps. Pourtant, dans cette nouvelle collection Automne/Hiver 2014, Slimane prend ses distances avec l’allure trop hachurée qu’il dessinait pour s’approcher de l’élégance raffinée d’un costume Saint Laurent. Empreint d’une nostalgie mêlée d’un rockabilly fifties et d’un rock’n roll seventies, ce virtuose décline l’homme en regard à la femme Saint Laurent. Une vision unisexe de la mode qui s’ancre à la perfection dans une actualité aux tourments quant aux questions de genre, questions médiatiques plus qu’il en est dégorgeant la crainte des changements qui s’opèrent. Lui s’y jette à cœur perdu et appelle pour défiler de jeunes joueurs de musique ou chanteurs issus de groupes de rock aux noms presque inconnus. Face aux critiques espérant un look révolutionnaire et s’attendant au déploiement d’un génie nouveau, l’impression de déjà vu fait vague. Pourtant comment reprocher la patte d’un artiste de s’apposer sur ce qui resta jusque là un style plutôt indéterminé par ses prédécesseurs.
La Maison entend bien se renouveler et garder toute à la fois l’ADN de son passé. C’est en sortant une nouvelle version du Duffle Bag, créé par Hedi Slimane en Avril 2012, alors inspiré par un de ses sacs de voyage que l’on peut peut-être discerner la nouveauté d’une maison en plein remaniement. En effet, le classique de la marque empreinte d’une furieuse élégance se marie à merveille avec le style de son nouveau directeur artistique. Pièce devenue signature de Saint Laurent Paris, le Duffle Bag se décline en version femme et homme gardant cette androgynie en écho aux collections prêt-à-porter. Slimane se jouent des points faibles d’une marque aux vêtements iconiques mais qui manquent de coups marketings efficaces à l’heure actuelle, ceux-ci se concentrant essentiellement dans les lignes accessoires des maisons de couture. Pas étonnant que bon nombre des directeurs artistiques des grandes Maisons soient issus de cursus tournés spécifiquement vers l’objet. Louis Vuitton, comme tant d’autres, font marcher la machine par l’envolée des sacs fantasmés. À son tour, Saint Laurent entre dans la tourmente tout en gardant cette esthétique racée et épurée alliée à la puissance du style du créateur-photographe. Le zip se fait discret mais la lanière de cuir qui habille le côté droit de l’objet nous rappelle les lanières-ceintures des perfectos qui font encore le plaisir de l’esthétique grunge et rock. Décliné en plusieurs couleurs sombres et neutres, la version homme se confond avec son homologue féminin dans des courbes minimalistes, une allure rigide parvenant par cette ossature à la justesse de la silhouette Saint Laurent.
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