1971, La Collection Scandale d’Yves Saint Laurent

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Jamais un défilé du couturier ne s’attira autant de haines. En 1971, soit un peu plus de vingt-cinq ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, la mémoire des privations de l’Occupation était encore forte. On se souvenait des tickets de rationnement tant alimentaires que textiles, des tissus médiocres, des vêtements rapiécés, des accessoires bricolés et d’une mode au rabais qui était le lot de la plupart des femmes, aux prises avec les difficultés matérielles. Cependant, la faute de la collection de 1971 ne résidait pas dans ces références aux privations matérielles qu’avait supposé l’Occupation, non. La collection de 1971 ne convoquait pas la garde-robe ordinaire de la guerre, c’en était une autre. Composée de vêtements plus luxueux, plus tapageurs, c’était celle arborée par les femmes qui s’étaient livrées à l’une des pires collaborations avec l’occupant, la « collaboration horizontale ». C’est du moins ainsi qu’on le perçu rétrospectivement. A la Libération, ces femmes – qualifiées d’infâmes – avaient été tondues pour avoir « couché avec les Allemands ».

La faute d’Yves Saint Laurent n’était pas de goût, elle était sexuelle, morale, politique. Prudence Glynn, écrivit dans le Times du 30 janvier : « Si vous songez à vous habiller ainsi, prenez garde à votre réputation. Sinon vous risquez bien de passer pour une professionnelle de la collaboration horizontale ». Pourtant cette tendance du rétro était portée en germe dans la société depuis bientôt deux ans, après les optimistes années 60 la mode regardait désormais en arrière. Des femmes, telle Paloma Picasso, ravivent par leurs tenues le souvenir des images glamour du cinéma hollywoodien des années 40. Née après-guerre, cette jeune génération ne voit pas «l’horreur dans ces tenues » mais en apprécie l’esthétique travaillée. Déjà en 1966, Yves Saint Laurent s’était laissé séduire par le charme du rétro dans les costumes qu’il dessina pour Catherine Deneuve dans le film Belle de jour.

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